Préparée par un dossier de 38 pages, réactualisation du dossier élaborée en janvier 2023 : 2311-05-dossier FELCO -corrigé 5 nov 23, cette audience nous a été accordée par Madame Cécile Laloux, conseillère en charge des questions pédagogiques. Elle s’est déroulée le vendredi 6 octobre 2023, de 10 h à 10h45.
L’entretien s’est déroulé dans un climat cordial, notre interlocutrice disant découvrir le dossier. Elle nous informe de la création par le Ministre d’une mission « exigence des savoirs » (Note FELCO : voir par exemple https://www.francetvinfo.fr/societe/education/ecole-gabriel-attal-lance-une-mission-exigence-des-savoirs-avec-une-priorite-sur-le-francais-et-les-mathematiques_6102981.html), entre autres, par le directeur général de l’enseignement scolaire, Edouard Geffray, le président du Conseil scientifique de l’Education nationale, Stanislas Dehaene, ou encore le recteur de Mayotte, Gilles Halbout. Elle nous invite à entrer en contact avec les coordonnateurs de cette mission. Elle se propose de leur faire parvenir à la mission les exemplaires du dossier que nous lui avons remis.
Nous avons également remis à Madame Laloux la pétition du Collectif pour les littératures en langues régionales à l’école soutenue par la FELCO, et nous avons brièvement expliqué l’esprit de cette pétition : il s’agit, au-delà de nos demandes d’enseignement des langues régionales dans les territoires concernés, de sensibiliser l’ensemble du pays à l’existence de ces langues et des littératures qu’elles portent, de même manière que les élèves sont sensibilisés aux littératures du monde entier, présentées en traduction. Nous avons souligné la conclusion du texte de la pétition «l’ouverture des programmes sur notre diversité interne est un premier pas vers un nouvel humanisme ouvert à l’Autre ».
Les points essentiels de l’entretien
Ils figurent en première page du dossier et sont rappelés à la suite de ce compte rendu. Dans ces échanges, nous n’avons bien évidemment pu tout traiter. Nos interventions, conformément au dossier, portaient sur les difficultés et blocages mais aussi sur des propositions.
Difficultés et blocages
- La non-application de l’article 7 de la Loi de mai 2021, désormais intégré dans le code de l’Éducation (Article L312-11-2. Version en vigueur depuis le 24 mai 2021- Création LOI n°2021-641 du 21 mai 2021 – art. 7 : Sans préjudice de l’article L. 312-11-1, dans le cadre de conventions entre l’Etat et les régions, la collectivité de Corse, la Collectivité européenne d’Alsace ou les collectivités territoriales régies par l’article 73 de la Constitution, la langue régionale est une matière enseignée dans le cadre normal des écoles maternelles et élémentaires, des collèges et des lycées sur tout ou partie des territoires concernés, dans le but de proposer l’enseignement de la langue régionale à tous les élèves).
- la situation de nos enseignements et les conditions de travail de nos collègues ne cessent de se dégrader malgré nos alertes répétées, les situations de souffrance des collègues sont nombreuses, résultats de pratiques managériales irrespectueuses et de la dévalorisation de la discipline dans le cadre des cursus
- le nombre de postes aux concours et la nécessité, pour l’agrégation, de publier des programmes aux mêmes dates que pour les autres disciplines (généralement au printemps de l’année précédant le concours), alors que les programmes de l’agrégation d’occitan-langue d’oc ne sont jamais publiés avant l’automne, ne laissant ni aux agrégatifs (uniquement des collègues en exercice) ou aux formateurs le temps de préparer les épreuves
- Les carences en ressources humaines d’enseignement et d’encadrement (enseignants et conseillers pédagogiques) dues à des années malthusiennes en matière de recrutement
- les difficultés actuelles de recrutements d’enseignants de langues régionales, qui provient, comme pour toutes les disciplines, de la désaffection dont souffre le métier d’enseignant,
- le blocage apparent de la convention-cadre sur les langues régionales, alors que les conventions précédentes ont pris fin en décembre 2022
- les moyens spécifiques ministériels fléchés nécessaires pour éviter aux académies concernées la situation de concurrence entre leurs charges générales incompressibles et l’obligation faite par la loi d’assurer l’enseignement des langues régionales dans le but de transmettre une langue reconnue comme élément du patrimoine national.
- Les disparités abyssales entre les différents espaces de la langue d’oc (le CRPE spécial n’est pas ouvert dans toutes les académies, la présence de Conseillers pédagogiques départementaux n’est pas assurée dans tous les départements, le maillage territorial de la maternelle au baccalauréat est très inégal en fonction des bassins d’enseignement, l’existence de formation à l’occitan en INSPE n’est pas généralisée, de même que l’existence de formation de licence d’occitan…). Les points de fragilité correspondent, peu ou prou, aux territoires non couverts par l’Office public de la langue occitane (Régions Occitanie et Nouvelle-Aquitaine) et aux académies non concernées jusqu’à présent par des conventions Rectorat / Région.
Quelques-unes de nos propositions
- Application de l’article 7 de la loi sur la protection patrimoniale et la promotion des langues régionales dite loi « Molac »[1]
- rétablissement de l’option langue régionale au CRPE avec statut bonifiant, compatible avec l’évaluation en LVE
- retour à un statut bonifiant pour l’option langue régionale à l’examen du baccalauréat
- augmentation significative du nombre de postes au CAPES (et ouverture de sessions de CAPES interne) et à l’agrégation correspondant aux 32 départements concernés
- dotation ministérielle fléchée pour les huit académies de l’espace occitan, conformément aux principes d’égalité républicaine et aux immenses besoins des zones d’éducation sinistrées (Académies de Clermont, Grenoble, Limoges et départements alpins de l’Académie d’Aix).
- Couverture des 8 académies occitanes par la future convention-cadre.
Notre interlocutrice a pris note de toutes nos demandes, elle a souhaité prendre le temps d’étudier le dossier et nous a promis de s’informer sur l’état de la convention. Elle s’est engagée à faire remonter nos demandes et elle est revenue sur quelques points, notamment l’impact de la réforme du lycée.
Ceci nous permet d’argumenter sur la dévalorisation de nos enseignements et les problèmes d’accessibilité à ceux-ci induits par son application. De même, elle nous permet de rebondir sur la question de l’équilibre entre offre et demande d’enseignement de langues régionales. Nous insistons alors sur ce point primordial et lui demandons que l’État applique enfin la loi : celle-ci prévoit l’objectif de « proposer l’enseignement de langue régionale à tous les élèves ». Nous exposons quelques exemples de blocages sur le terrain (réticences de la part des chefs d’établissement de proposer l’enseignement). Nous soulignons le refus réitéré de la part du Ministère d’attribuer des moyens spécifiques aux académiques concernées par l’occitan alors que ces mêmes moyens spécifiques sont accordés à d’autres langues régionales.
Madame Laloux nous a invités à une nouvelle rencontre d’ici quelques semaines.