D’après le précieux site de l’Université de LAVAL : https://www.axl.cefan.ulaval.ca/europe/France-loi_Deixonne-texte-1951.htm
La loi no 51-46 du 11 janvier 1951 relative à l’enseignement des langues et des dialectes locaux, dite loi Deixonne – du nom de Maurice Deixonne, alors rapporteur de la commission parlementaire de l’Éducation nationale, qui avait présenté le projet de loi –, visait deux objectifs : d’abord, défendre la langue française, ensuite, protéger les langues régionales. Cette loi apparaissait à l’époque à la fois comme une loi linguistique et une loi scolaire. C’est donc une loi très importante parce qu’elle constituait, pour la première fois, une reconnaissance officielle du droit à l’existence des langues régionales (art. 1).
La loi a donné un contenu précis et restrictif au concept des langues régionales. En vertu de la loi, tout enseignant du primaire pouvait se référer à la langue locale dans le cadre d’un enseignement normal, y compris l’apprentissage du français. Autrement dit, l’enseignant n’était pas obligé d’utiliser la langue régionale, mais il pouvait le faire à la condition qu’il en fasse la demande ; si celle-ci lui était accordée, il pouvait prélever une ou deux heures par semaine sur le temps consacré aux « activités dirigées » (art. 3).
La loi Deixonne a été suivie par des décrets d’application pour la corse (1974), le tahitien (1981) et les langues mélanésiennes (1992) :
– DÉCRET N° 74-33 du 16 janvier 1974 relatif à l’enseignement des langues et dialectes locaux
– DÉCRET N° 81-553 du 12 mai 1981 relatif à l’enseignement des langues et dialectes locaux
– DÉCRET N° 92-1162 du 20 octobre 1992 relatif à l’enseignement des langues et dialectes locaux
La loi Deixonne est aujourd’hui abrogée, elle a été remplacée par la loi Bas-Lauriol de 1975, puis par la loi Toubon de 1994.
LOI N° 51-46 du 11 janvier 1951 (abrogée)
Objet : enseignement des langues et dialectes locaux
Article 1er
Le Conseil supérieur de l’Éducation nationale sera chargé, dans le cadre et dès la promulgation de la présente loi, de rechercher les meilleurs moyens de favoriser l’étude des langues et dialectes locaux dans les régions où ils sont en usage.
Article 2
Des instructions pédagogiques seront adressées aux recteurs en vue d’autoriser les maîtres à recourir aux parlers locaux dans les écoles primaires et maternelles chaque fois qu’ils pourront en tirer profit pour leur enseignement, notamment pour l’étude de la langue française.
Article 3
Tout instituteur qui en fera la demande pourra être autorisé à consacrer, chaque semaine, une heure d’activités dirigées à l’enseignement de notions élémentaires de lecture et d’écriture du parler local et à l’étude de morceaux choisis de la littérature correspondante.
Cet enseignement est facultatif pour les élèves.
Article 4
Les maîtres seront autorisés à choisir, sur une liste dressée chaque par le recteur de leur académie, les ouvrages qui, placés dans les bibliothèques scolaires, permettront de faire connaître aux élèves les richesses culturelles et le folklore de leur région.
Article 5
Dans les écoles normales, des cours et stages facultatifs seront organisés, dans toute la mesure du possible, pendant la durée de la formation professionnelle, à l’usage des élèves-maîtres et des élèves-maîtresses qui se destinent à enseigner dans une région où une langue locale a affirmé sa vitalité. Les cours et stages porteront, non seulement sur la langue elle-même, mais sur le folklore, la littérature et les arts populaires locaux.
Article 6
Dans les lycées et collèges, l ‘enseignement facultatif de toutes les langues et dialectes locaux, ainsi que du folklore, de la littérature et des arts populaires locaux, pourra prendre place dans le cadre des activités dirigées.
Article 7
Après avis des conseils de faculté et des conseils d’université, et sur proposition du conseil supérieur de l’Éducation nationale, il pourra être créé, dans la mesure des crédits disponibles, des instituts d’études régionalistes comportant notamment des chaires pour l’enseignement des langues et littératures locales, ainsi que de l’ethnographie folklorique.
Article 8
De nouveaux certificats de licence et diplômes d’études supérieures, des thèses de doctorat sanctionneront le travail des étudiants qui auront suivi ces cours.
Article 9
Dans les universités où il est possible d’adjoindre au jury un examinateur compétent, une épreuve facultative sera inscrite au programme du baccalauréat. Les points obtenus au-dessus de la moyenne entreront en ligne de compte pour l’attribution des mentions autres que la mention » passable « .
Article 10
Les articles 2 à 9 inclus de la présente ici seront applicables, dès la rentrée scolaire qui en suivra la promulgation, dans la zone d’influence du breton, du basque, du catalan et de la langue occitane.
Article 11
- a) À Rennes, un institut d’études celtiques organisera un enseignement des langues et littératures celtiques et de l’ethnographie folklorique;
b) À l’université de Bordeaux et à l’Institut d’études ibériques de Bordeaux, un enseignement de la langue et de la littérature basques sera organisé;
c) Un enseignement de la langue et de la littérature catalanes sera organisé à l’Université de Montpellier, à l’Université de Toulouse, à l’Institut d’études hispaniques de Paris et à l’Institut d’études ibériques de Bordeaux;
d) Un enseignement de la langue, de la littérature, de l’histoire occitanes sera organisé dans chacune des universités d’Aix-en-Provence, Montpellier et Toulouse.
La présente loi sera exécutée comme loi de l’État.
(Journal officiel du 13 janvier 1951)
Pour le corse:
DÉCRET N° 74-33 du 16 janvier 1974 relatif à l’enseignement des langues et dialectes locaux
Le premier ministre,
Sur le rapport du ministre de l’Éducation nationale,
Vu la loi n° 51-46 du 11 janvier 1951 et le décret n° 70-650 du 10 juillet 1970 concernant l’enseignement des langues et dialectes locaux ;
Vu l’avis du conseil supérieur de l’éducation nationale,
Décrète :
Article 1er
Les articles 2 à 9 inclus de la loi du 11 janvier 1951 et le décret du 10 juillet 1970 relatifs à l’enseignement des langues et dialectes locaux sont applicables dans la zone d’influence du corse.
Article 2
Le ministre de l’Éducation nationale est chargé de l’exécution du présent décret, qui sera publié au Journal officiel de la République française et qui sera applicable à la session de 1974 du baccalauréat de l’enseignement du second degré.
Fait à Paris, le 16 janvier 1974.
PIERRE MESMER
Par le Premier ministre :
Le ministre de l’éducation nationale,
JOSEPH FONTANET