Appel à communication colloque « Voix audibles, langues invisibilisées : quelles REconnaissances et Catégorisations pour les LAngues Minor(is)ées dans le monde? »

17-Nov-2025 – 19-Nov-2025 – Location: Bordeaux, France – date limite de soumission des communication : 27 avril 2025

Les termes « langue minoritaire » et « langue minor(is)ée », à l’instar de l’essai de théorisation de Blanchet (2005) sur les traits du champ conceptuel de « minorité », «minoration », et « minorisation » à travers une analyse interdisciplinaire, mettent volontairement l’accent sur un processus de hiérarchisation structurelle de type socio-politique (ibid) et nous permettent de saisir la complexité et l’amplitude des conséquences sur les populations visées, ainsi que sur leurs pratiques linguistiques. Nous observons cependant un foisonnement des terminologies, qui dépendent à la fois du contexte de la langue catégorisée (différences liées au statut, à l’aire géographique, culturelle, linguistique, etc), de l’ancrage de la personne qui propose ladite catégorisation (posture académique, posture militante, etc), ou encore de l’objectif du processus de catégorisation (recherche d’une reconnaissance officielle, volonté de non engagement d’un Etat, etc). Apparaît ainsi la nécessité d’une réflexion globale autour de ces questions, et donc d’un dialogue entre l’ensemble des acteur·ices impliqué·es (universitaires ou non), dans une démarche interdisciplinaire et interculturelle encourageant les échanges de bonnes pratiques de recherche de part et d’autre du globe.

Suite à un premier workshop préparatoire franco-brésilien qui s’est déroulé les 21 et 22 janvier 2025 à Bordeaux, pensé comme un laboratoire de réflexion autour des pratiques de recherche et de communication scientifique, le Colloque International RECLAM (17-18-19 novembre 2025, Bordeaux) proposera trois grands axes de réflexion (catégorisation / transmission / épistémologie) détaillés ci-dessous.

Nous aurons l’honneur d’accueillir le sociolinguiste français Philippe Blanchet (université de Rennes) et le linguiste et spécialiste en didactique des langues brésilien Valdir Heitor Barzotto (université de São Paulo) pour deux conférences plénières.

Dans une optique d’échanges et d’inclusion, le colloque RECLAM recherche des participant·es aux profils variés :

  • enseignant·e-chercheur·es
  • doctorant·es
  • acteur·ices non universitaires (par exemple venant du milieu associatif) mettant en place des actions de maintien ou revitalisation linguistique

Les trois axes pour lesquels les participant·es sont invité·es à soumettre des propositions sont :

1. Catégorisation des langues minor(is)ées

La terminologie elle-même, et notamment son foisonnement issu des nombreuses situations qu’elle cherche à décrire, est à interroger, sinon clarifier – une « langue d’appartenance » (Defays, 2018) est-elle une « langue d’identification » (Fabà Prats et Torres-Pla, 2019) ? Ces notions permettent un ancrage dans plusieurs domaines des sciences humaines et sociales – notamment en droit. Les langues sont en effet également des objets juridiques, notamment dans le choix d’une ou plusieurs langue(s) officielle(s) ou nationale(s) et/ou la (non)reconnaissance d’autres. Considérées comme éléments d’identification d’une nation ou d’un groupe, elles entraînent des conséquences juridiques (enseignement, langue de communication avec l’administration…) et posent un enjeu capital pour les Etats. Les travaux juridiques sur ces questions (Bertile, 2008) sont encore peu nombreux, d’où l’intérêt de mettre en avant cet aspect.
Les communications porteront sur (liste non-exhaustive) :
– catégorisation et droits linguistiques
– théorisation de la catégorisation des langues minor(is)ées
– étude de cas : catégorisation d’une ou plusieurs langue(s) / dans une aire culturelle et linguistique donnée
– les langues minor(is)ées dans les textes juridiques, législatifs, nationaux ou internationaux
– la terminologie au service des politiques linguistiques des Etats
– réappropriation de la terminologie par une/des communauté(s) linguistique(s)
– le rôle de la terminologie dans les relations entre revendications de catégorisation/reconnaissance et politiques linguistiques des Etats

2. Transmission des langues minor(is)ées

Une langue ne peut exister que si elle est transmise. Les questions liées à la transmission sont donc particulièrement importantes dans le cas de langues en danger. Ce volet permettra d’aborder (entre autres) des thèmes liés à l’acquisition, à l’enseignement-apprentissage (en tenant compte de la proposition de Barzotto (2004) d’intégrer les différentes variétés linguistiques des élèves dans l’enseignement, aux côtés de la langue standardisée et officialisée), aux politiques linguistiques et politiques linguistiques familiales (Haque, 2019), ou à la place du standard (Andión & Gil, 2013) et la prise en compte de la polynomie (Ottavi, 2010) au niveau didactique.
Les communications porteront sur (liste non-exhaustive) :
– Méthodes de transmission d’une langue minor(is)ée
– Transmission linguistique et militantisme
– Image sur la langue et ses usages
– Devoir de mémoire : une passerelle vers la transmission ?
– Dichotomie enseignement/apprentissage en terrain contextualisé
– Les politiques linguistiques familiales
– De la transmission familiale à l’apprentissage : rôle de l’école dans la transmission
– Didactisation de la diversité linguistique : place du “standard” et de la variation dans l’enseignement

3. Volet épistémologique : les langues minor(is)ées et la production scientifique

Dans le sillon de la sociolinguistique catalano-occitane, dite également « périphérique » (Lafont, 1997 ; Boyer, 2012), il convient de se questionner sur le positionnement du chercheur en terrain minorisé (Agresti, 2020). Qui fait de la recherche sur les questions de minorisation, comment, pourquoi, avec qui et avec quelle légitimité ? Quelle place donner aux locuteur·rices et aux communautés linguistiques dans le processus de recherche ? La société civile s’empare-t-elle des résultats de la recherche universitaire ? Ces questions offrent diverses possibilités d’interventions de la part de chercheur·es issu·es de milieux et zones géographiques différents avec des membres de communautés linguistiques minorisées. Des notions telles que le point de vue étique/émique (Sardan, 1998), l’aménagement linguistique « de par en haut », « de par en bas » ou « à mi-palier », ou encore des mouvements tels que la Linguistique Pour le Développement (Métangmo-Tatou, 2020 ; Zouogbo (dir.), 2022), particulièrement développée sur le continent africain, pourront être mobilisés. De plus, l’étude des images de la langue dans les productions scientifiques et les discours officiels permet de comprendre non seulement les processus d’incorporation et d’adaptation linguistiques, mais aussi la manière dont la production universitaire participe, directement ou indirectement, à la politique linguistique et au développement des identités culturelles et linguistiques.
Les communications porteront sur (liste non-exhaustive) :

  • Image(s) des langues minor(is)ées dans les textes académiques
  • Production et reproduction de la connaissance en langues minor(is)ées
  • Vulgarisation scientifique en langues minor(is)ées
  • Publish, Perish… or Resist ? Les langues minor(is)ées dans la production scientifique
  • Langues minor(is)ées en sciences humaines : entre fascination académique et exclusion institutionnelle

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Les langues de RECLAM

La culture académique dans laquelle nous sommes immergée nous a poussés à créer des espaces de rencontre où le multilinguisme est compris comme un problème logistique pour partager nos résultats scientifiques et nos projets. Comment garantir un espace académique sociolinguistiquement inclusif et, en même temps, assurer l’intercompréhension entre les acteurs scientifiques ? Cette question représente un défi pour les communautés académiques, notamment lorsque celles-ci ne disposent pas des ressources matérielles nécessaires pour fournir des traducteurs et des interprètes lors de leurs événements.
Ce problème devient encore plus complexe lorsque l’objet d’étude qui nous réunit concerne les langues minor(is)ées. Nous en parlons, ainsi que de la diglossie à laquelle elles sont soumises, mais nous le faisons généralement dans les langues qui se trouvent de l’autre côté de cette relation diglossique ; ce qui, paradoxalement, contribue à la perpétuer. Comment faire face à cette contradiction et lancer le débat sur la place de ces langues dans le monde académique ?
Pour RECLAM, cette question constitue à la fois un objet d’étude et un défi dans l’organisation de notre colloque. C’est pourquoi une partie importante de notre travail d’organisation a consisté à élaborer une politique linguistique aussi efficace que possible et ce, dès l’organisation de notre premier Workshop en janvier 2025 où nous avons pu expérimenter divers formats de communication multilingue. Nous nous sommes interrogées sur les limitations du nombre de langues utilisées pour la communication orale ainsi que sur la création de supports multilingues pour nous aider à garantir l’intercompréhension. À l’aide d’un questionnaire, nous avons recueilli, a posteriori, les avis des participant·es (communicant·es et public) sur leur expérience linguistique durant l’événement pour servir de base à l’amélioration de notre dispositif d’intercompréhension pour le colloque international.
C’est pourquoi, dans le cadre de cet appel à communication, nous vous proposons de rédiger votre résumé dans 2 langues parmi les 4 proposées (français, portugais, espagnol, anglais). Si vous êtes locuteur·ice d’une langue minor(is)ée, vous pouvez également joindre un résumé supplémentaire dans cette langue.

RECLAM : un projet inclusif pour travailler main dans la main :
Afin de faire coïncider les réflexions scientifiques et les actes, nous souhaitons intégrer des membres des communautés linguistiques minor(is)ées aussi bien à nos discussions qu’à l’organisation même de l’événement. Ainsi, certains espaces de communication du colloque seront ouverts à des acteurs non scientifiques : témoignages, présentation d’une action déployée sur le terrain, etc. De plus, nous nous appuierons sur un réseau d’acteurs locaux pour faire découvrir les langues et cultures minor(is)ées locales (occitan, basque) au travers d’activités culturelles avec des associations partenaires.

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Consignes et formats de communication

Les résumés anonymisés (300 mots maximum, hors bibliographie) devront être envoyés le 13 avril 2025 à l’adresse comite.languesminorisees@gmail.com dans au moins deux des langues de communication du colloque : français, portugais, espagnol, anglais. Un résumé en langue minor(is)ée pourra être ajouté.

Les propositions de communication devront être rédigées dans un document .doc / .docx (Times New Roman, 12 p.p.).
L’objet du mail devra être intitulé “Proposition de communication”.
Dans le corps du mail, vous renseignerez les éléments suivants :

  • Prénom (en minuscule), NOM (en majuscule)
  • Institution d’attache
  • Statut (enseignant·e/chercheur·e, doctorant·e, acteur·ice non académique, …)
  • Titre de la communication
  • Mots-clés (5 mots au maximum)
  • Préciser l’axe ou les axes dans le(s)quel(s) s’inscrit votre communication
  • Préciser les langues dans lesquelles vous pouvez rédiger une communication scientifique (diaporama)
  • Préciser les langues dans lesquelles vous pouvez comprendre une communication scientifique
  • Préciser si vous envisagez d’assister au colloque en présentiel ou à distance (les deux modalités sont acceptées mais en cas de réponses nombreuses, les présentations en présentiel seront privilégiées)

Pour toute question, vous pouvez nous écrire à l’adresse mail suivante : comite.languesminorisees@gmail.com

Calendrier

  • date limite d’envoi des propositions de communication : 27 avril 2025
  • date de réponse d’acceptation : Mi-juin 2025
  • dates du colloque : 17-18-19 novembre 2025

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Le collectif

Le Collectif RECLAM (REconnaissance et Catégorisation des LAngues Minor(is)ées – signifie « écho » en occitan gascon) est composé de six jeunes chercheuses de l’Université Bordeaux Montaigne (UBM) et de l’Université de São Paulo (USP) au Brésil, avec l’appui de leurs directeurs de recherche :

  • Giovanni AGRESTI, Professeur des Universités en Sciences du Langage à l’Université Bordeaux Montaigne (France) et Maître de Conférences en Linguistique, Langue et Traduction – Langue française à l’Université Federico II de Naples (Italie).
  • Valdir Heitor BARZOTTO, Professeur des Universités Titulaire et Vice-Directeur de l’Université d’Education de São Paulo (Brésil).

Membre du Comité d’organisation

AGRESTI Giovanni (IKER, Université Bordeaux Montaigne)
GUICHARD-LIBERSAC Camille (IKER, Université Bordeaux Montaigne et Programa FLP, FFLCH, Universidade de São Paulo)
MONTENEGRO GÓMEZ Paula Alexandra (CLLE-Montaigne, Projet PaRL, Université Bordeaux Montaigne)
PAILLET Lucie (IKER, Université Bordeaux Montaigne)
PENITENTE ANDRADE Natália (Programa FLP, FFLCH, Universidade de São Paulo)
ROBERT Lucie (IKER, Université Bordeaux Montaigne)
SARRAUTE-ARMENTIA Marie (IKER, Université Bordeaux Montaigne)

Comité scientifique

  • ANGELO Denise (Australian National University, Australie)
  • BARZOTTO Valdir (Universidade de São Paulo, Brésil)
  • BERTILE Véronique (CERCCLE, Université de Bordeaux, France)
  • BLANCHET Philippe (BLM-CELTIC, Université de Rennes 2, France)
  • BUSQUETS Joan (CLLE-Montaigne, Université de Bordeaux Montaigne, France)
  • CASTETS Rémi (D2IA, Université de Bordeaux Montaigne, France)
  • CHATEAUREYNAUD Marie-Anne (LAB-E3D, Université de Bordeaux, France)
  • DJORDJEVIC-LÉONARD Ksenija (DIPRALANG, Université de Montpellier 3, France)
  • FERNANDES Carla (AMERIBER, Université Bordeaux Montaigne, France)
  • GUILLIOT Nicolas (CLLE-Montaigne, Université de Bordeaux Montaigne, France)
  • LAUNEY Michel (Professeur honoraire à l’Université Paris-Cité France, directeur de recherche honoraire à l’IRD-Guyane, France)
  • LÉONARD Jean-Léo (DIPRALANG, Université de Montpellier 3, France)
  • MOYA Sindy (Pontificia Universidad Javeriana, Colombie)
  • OLÇOMENDY Argia (IKER, Université Bordeaux Montaigne, France)
  • PRADEAU Coraline (DYLIS, Université de Rouen, France)
  • RIOLFI Claudia (Universidade de São Paulo, Brésil)
  • STULIC Ana (AMERIBER, Université Bordeaux Montaigne, France)
  • SUZUKI Elli (D2IA, Université de Bordeaux Montaigne, France)
  • VIAUT Alain (Chercheur émérite au CNRS, France)
  • VILLA PEREZ Valeria (CLLE-Montaigne, Université de Bordeaux Montaigne, France)
  • ZOUOGBO Jean-Philippe (CLILLAC, Université Paris Cité, France)

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Bibliographie indicative

  • AGRESTI, Giovanni, 2020. La médiation du linguiste dans le conflit diglossique : du regard rétrospectif aux nouvelles perspectives. In : L’essentiel de la médiation. Le regard des sciences humaines et sociales. Bruxelles : Peter Lang. pp. 123‑142.
  • ANDIÓN HERRERO, María Antonieta et GIL BURMANN, María, 2013. Las variedades del español como parte de la competencia docente: Qué debemos saber y enseñar en ELE/L2. In : JIMENO PANÉS, Maribel (coord.) Actas del I Congreso Internacional de Didáctica de Español como Lengua Extranjera. Budapest: Instituto Cervantes de Budapest. pp. 45-57.
  • BARZOTTO, Valdir Heitor, 2004. Nem respeitar, nem valorizar, nem adequar as variedades lingüísticas. Ecos Revista, Cáceres – MT, Vol n°2, pp. 93-96.
  • BERTILE, Véronique, 2008. Langues régionales ou minoritaires et Constitution: France, Espagne et Italie. Bruxelles : Bruylant.
  • BLANCHET, Philippe, 2005. Essai de théorisation d’un processus complexe: Cahiers de sociolinguistique. 1 décembre 2005. Vol. n° 10, n° 1, pp. 17‑47. DOI 10.3917/csl.0501.0017.
  • BOYER, Henri, 2012. L’implication du sociolinguiste « périphérique » dans DOTTE Anne-Laure, MUNI TOKE Valelia et SIBILLE Jean, Langues de France, langues en danger: aménagement et rôle des linguistes, Cahiers de l’Observatoire des pratiques linguistiques n° 3, Paris, Ministère de la Culture et de la Communication, DGLFLF, pp.79-85
  • DEFAYS, Jean-Marc, 2018. Chapitre II. Explorer, expliquer et exploiter la langue sous tous ses aspects. In : Enseigner le français langue étrangère et seconde: approche humaniste de la didactique des langues et des cultures. Bruxelles : Mardaga supérieur, 2018. pp. 27‑79. Psy, 19.
  • FABÀ PRATS, Albert et TORRES-PLA, Joaquim, 2020. De la llengua inicial a la llengua d’identificació a Catalunya : qui adopta el català i qui se n’allunya. Treballs de Sociolingüística Catalana. 2020. N° 30, pp. 213‑232. DOI 10.2436/20.2504.01.168.
    HAQUE, Shahzaman, 2019. Politiques linguistiques familiales. LINCOM EUROPA, 2019.
  • LAFONT, Robert, 1997. Quarante ans de sociolinguistique à la périphérie. Paris : Harmattan. Collection Sociolinguistique. ISBN 978-2-7384-5808-7.P40.45.F8 L33 1997
  • MÉTANGMO-TATOU, Léonie, 2020. Pour une linguistique du développement. Essai d’épistémologie sur l’émergence d’un nouveau paradigme en sciences du langage [en ligne]. Zenodo.
  • OTTAVI, Pascal, 2010. Langue corse et polynomie: Retour sur un processus langagier dans l’enseignement secondaire. Cahiers de sociolinguistique. 1 juin 2010. Vol. n° 15, n° 1, pp. 87‑96. DOI 10.3917/csl.1001.0087.
  • ZOUOGBO, Jean-Philippe (éd.), 2022. Linguistique pour le développement : concepts, contextes et empiries. Paris : Editions des archives contemporaines. Collection InterCulturel. ISBN 978-2-8130-0434-5.

 

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